Pas question d’embellir la situation; nous avons beaucoup à dire ce trimestre. Un marché qui a baissé la garde face aux valorisations élevées et a été étourdi par les perspectives de l’intelligence artificielle a été brutalement ramené à la réalité. Au moment où nous écrivons cette lettre, Donald Trump est en train de renverser des décennies de croissance liée au libre-échange avec des tarifs douaniers protectionnistes qui, en fin de compte, équivalent à une taxe sur tous les biens importés. Bien sûr, les pays ripostent par des mesures semblables et la croissance à court terme de l’économie mondiale est désormais incertaine.

Au cours du premier trimestre, nous avons assisté à plusieurs feintes de la tête concernant les tarifs douaniers et à des négociations géopolitiques chaotiques. Plus surprenante encore, la rhétorique autour de l’annexion d’alliés au Panama, au Groenland et… au Canada? La prétention extravagante de faire du Canada le 51e État des États-Unis sous-tend peut-être des impératifs stratégiques à long terme, mais ce type de rhétorique a choqué les marchés mondiaux en général et le Canada en particulier. Par conséquent, les actions mondiales ont chuté, à commencer par les actions américaines, tandis que les actions canadiennes ont surpassé leurs voisines du sud.

À première vue, le piètre rendement des actions américaines et le rendement relativement meilleur des actions canadiennes pourraient sembler paradoxaux. Mais souvent, l’explication la plus simple est la meilleure. Peu importe le catalyseur d’une détérioration des perspectives économiques, les sociétés dont les valorisations sont absurdement élevées et les espoirs de bénéfices lointains sont les plus exposées. C’est exactement ce que nous avons observé depuis le début de l’année. De nombreuses actions canadiennes ne sont pas excessivement chères et, bien qu’elles ne soient pas à l’abri des pressions des marchés, elles n’ont pas autant souffert que les actions américaines.

Pour ce qui est des États-Unis, je suis certain que bon nombre d’entre vous ont vu les manchettes inquiétantes. « 5 400 milliards de dollars s’évaporent en deux jours de débâcle à Wall Street. » Une grande partie de cette « évaporation » était des espoirs spéculatifs dont on pourrait dire qu’ils n’ont jamais été réels. Environ la moitié de ces pertes provenaient de seulement dix actions. Trois actions, Apple, Tesla et Nvidia, ont représenté près de 20 % de la baisse du marché. Si notre portefeuille n’a pas été épargné, il s’est nettement mieux comporté que l’ensemble du marché au cours des derniers mois.

Et maintenant? Le mal est fait sur le plan de l’incertitude. Les propriétaires et les dirigeants d’entreprises auront du mal à s’engager dans des investissements importants ou des embauches à grande échelle dans ce contexte chaotique. Les mesures de la confiance des consommateurs américains approchent des niveaux les plus bas atteints durant la pandémie de COVID-19. Au moins, le Canada a échappé aux pires des scénarios en ce qui a trait aux tarifs douaniers. Des protestations aux États-Unis et même des grondements au sein du Parti républicain ont, au minimum, retardé des mesures de plus grande ampleur.

Tout n’est pas perdu. En fait, si vous me permettez un peu d’optimisme, la détresse crée des occasions. L’élimination des barrières commerciales interprovinciales au Canada et l’accent accru mis sur les investissements et la productivité sont devenus une priorité absolue. En Europe, même l’Allemagne, qui est habituellement économe, se rend compte qu’elle doit investir davantage, tant sur le plan militaire que celui des infrastructures. Nous continuons de considérer l’intelligence artificielle comme un moyen d’accroître la productivité dans tous les secteurs à long terme, même si l’engouement a peut-être dépassé les occasions à court terme. La fabrication ne sera peut-être pas rapatriée comme le souhaiterait Donald Trump, mais cette tendance était déjà en place après la pandémie de COVID-19 et représente une occasion pour certaines sociétés industrielles engagées dans l’automatisation (ce qui limite malheureusement le retour d’emplois désormais obsolètes).

Nous n’essaierons pas de prédire les décisions prises par Trump (bonne chance) ni le moment où le marché touchera le fond. Une récession pourrait s’ensuivre. Le cours des actions des sociétés pourrait chuter. Mais en réalité, ce problème n’est que théorique. Les sociétés de qualité qui produisent des flux de trésorerie, versent des dividendes durables et se négocient à des valorisations raisonnables regagneront sans aucun doute le terrain perdu au fil du temps. Et bien entendu, lorsque les marchés boursiers baissent, des occasions se présentent. Souvent, les ventes sans discernement aboutissent au regroupement des bonnes entreprises avec les mauvaises. Les sociétés figurant sur notre liste de surveillance atteignent des valorisations qui semblent maintenant plus intéressantes.

Soyez assuré que notre comité de placement demeure diligent et qu’il se réunit régulièrement pour discuter des risques et des occasions dans le contexte actuel. Nous avons accumulé des liquidités grâce aux dividendes et cotisations versés pour tirer parti de perturbations comme celle-ci. Nous surveillons de près tous les placements et saisirons patiemment les occasions. Comme l’a dit M. Buffet, il est important de garder la tête froide lorsque tous les autres perdent la leur.

Nous sommes reconnaissants de la confiance que vous nous témoignez et nous sommes prêts à répondre à toutes vos questions.